Le bonheur est dans le petit rucher

Christian Vachon - 10 juillet 2023

Pas besoin de pratiquer l’élevage des abeilles pour s’emballer de cette nouvelle édition, chez Écosociété, de L’abeille et la ruche : Manuel d’apiculture biologique d’Alain Péricard ! On y découvre tout, tout, tout ce qu’il faut savoir sur le monde fascinant des abeilles au Québec.

Bien sûr, l’ouvrage demeure indispensable pour qui veut se lancer dans cette aventure apicole respectueuse de l’environnement. En huit chapitres, agrémentés de multiples photos et tableaux explicatifs (et de délicates illustrations de Cécile Liénaux), Alain Péricard, adepte d’une « sobriété heureuse » depuis sa rencontre avec Pierre Rabhi en Afrique, nous fait profiter de son expérience de plus de trente ans d’apiculteur écologiste comblé. Il témoigne qu’une exploitation apicole familiale de 30 ruchers, plutôt que de 300, est rentable au Québec.

Péricard invite toutefois à la prudence, et à la patience. « Il n’existe pas de domaine », avertit-il dans son introduction, « où le néophyte s’expose à autant d’erreurs qu’en apiculture. » Surtout au Québec, avec notre climat, le manque de nourriture durant les saisons mortes, les maladies, les parasites envahissants et ce problème commun à l’Amérique du Nord de la fécondité des reines.

Rien d’insurmontable, tout de même, si on tient compte des multiples mises en garde de l’apiculteur écologique expert.

Il enseigne comment dépister le varroa, cet acarien pouvant commettre de terribles ravages dans une ruche. La meilleure arme pour gérer ce parasite : la prévention. Le Québec échappe encore, heureusement, à l’invasion des frelons asiatiques, capturant les abeilles pour en nourrir ses larves ! Péricard rappelle qu’il faut examiner, matin et soir, l’entrée de chaque ruche (« qui en dit toujours long sur ce qui se passe à l’intérieur »); savoir quand cesser la récolte afin de préparer l’hivernage (Péricard préfère le faire tôt, et sacrifier, en septembre, « quelques kilos de miel foncé », afin d’éviter de fatiguer inutilement les abeilles); bien emballer ses ruches l’hiver, avec de la paille, tout en prenant soin d’en dégager l’entrée (en permettant, ainsi, une bonne circulation de l’air et l’évacuation de l’humidité); offrir à vos insectes (qui, sans dormir, vivent au ralenti durant cette saison hivernale) une nourriture de qualité, un sirop sucré idéalement.

Des pertes, lors de l’hivernage, ce n’est pas si terrible, rassure Péricard. Un déclin, de 5 à 10% de votre rucher est normal et même profitable. « Il faut laisser la sélection naturelle faire son boulot. » Les nombreuses abeilles qui survivent sont d’un meilleur lignage, plus endurant à notre climat.

Et, enfin, comme faire fi du tracas de la fécondité ? En sélectionnant, si possible, votre reine dans un petit élevage situé dans un secteur exempt d’exposition aux pesticides systémiques.

Apis cerana sur une fleur – Photo de Charles Lam

Lire cet Abeille et la ruche, c’est s’émerveiller, surtout, pour ce super-organisme qu’est l’essaim d’abeilles, développant une forme d’intelligence collective (« une abeille seule ne peut pas survivre »), un super-organisme mis à mal par l’avidité humaine.

Péricard en profite pour bousculer quelques idées reçues sur ces bestioles et sur les pratiques apicoles. Entre autres, la reine « ne règne pas sans partage » dans cet univers : constamment surveillée, elle jouit simplement d’un rôle honorifique qui lui vaut, certes, certains égards de ses sujets, mais sans qu’elle jouisse d’une réelle autorité sur leur destinées. Et cette apiculture urbaine tant vantée est une « fausse bonne idée » qui, sans aucune assurance de récolter un miel « plus sain » qu’à la campagne, risque de mener à de graves problèmes de surpopulation d’abeilles.

Les bienfaits de l’abeille, faut-il le répéter, ne se résume pas qu’au miel même si c’est déjà énorme. Ces ouvrières infatigables effectuent un travail millénaire de pollinisation, de multiplication des plantes et cela suffit amplement à nous en préoccuper. « Prendre soin des abeilles », insiste Péricard, « c’est prendre soin de nous-mêmes. »

Un message compris, nous dévoile en conclusion l’apiculteur heureux, par une contrée d’Europe soucieuse de préserver, en surveillant étroitement l’usage des pesticides, la biodiversité de sa faune et de sa flore. La Slovénie, qui a fait de cet amour des abeilles un motif de fierté nationale, propose de généreux programmes d’aide au démarrage de ruchers écologiques. Il y a maintenant 10 000 apiculteurs dans ce pays, une ruche pour 12 habitants.

Bien sympathiques, ces Slovènes.

– Christian Vachon (Pantoute),  9 juillet 2023

Jardinage

L'abeille et la ruche : manuel d'apiculture écologique

Alain Péricard et Cécile Liénaux - Écosociété

Alain Péricard a développé un petit rucher (35−40 ruches) dont la tenue est respectée de ses pairs. Il partage avec une grande générosité le fruit de son expérience et de son savoir pour accompagner quiconque aspire à se lancer ou à se perfectionner en apiculture. Faire découvrir le monde des abeilles, comprendre leur fonctionnement et partager de bonnes pratiques apicoles, tels sont les objectifs de ce manuel.

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