André Martineau, anthropologue de formation, homme en quête de sens dans notre monde déraisonnable, est fasciné par l’insolite. Il adore les histoires qui contiennent leur part de mystère, tentant d’en savoir toujours plus sur ces événements énigmatiques et de retrouver « les morceaux perdus du puzzle », car, pour le chercheur, « l’histoire n’est jamais terminée ».
Depuis quelques années, il nous fait partager sa passion en animant le balado L’histoire ne s’arrête pas là sur la plateforme OHdio de Radio-Canada. Le balado est consacré à des faits divers intrigants et trop longtemps ignorés de notre passé. Il a sélectionné quelques-uns de ces épisodes et les a « enrichis de détails inédits » pour en faire un ouvrage publié aux éditions Hurtubise : L’histoire ne s’arrête pas là : douze épisodes méconnus de l’histoire. Ce recueil d’événements incroyables, « plus que simplement divertissants », est une sorte de complément plus fouillé, plus documenté et « riche en enseignements de toutes sortes » aux quatre tomes du Québec insolite de l’éditeur Broquet.
André Martineau nous entretient d’un « des meurtriers les plus barbares de son temps », le docteur Cream, l’empoisonneur de l’université McGill exécuté à Londres en 1892, et d’une brigade de Gaspésiens guetteurs de sous-marins allemands.
Il cherche à découvrir pourquoi le capital de sympathie d’un homme politique québécois demeure intact (« Ted Kennedy n’a pas la même chance ») après un tragique événement qui aurait pu se transformer « en crise politique et personnelle » (chapitre 1 : L’accident de René Lévesque : un premier ministre qui passe sur un itinérant).
Il déterre aussi des épisodes regrettables de notre passé qu’on souhaiterait enfouis à jamais : une guerre des Éteignoirs, en 1856, impliquant des habitants du sud de Montréal s’opposant « aux lumières du savoir » et qui se révoltent contre le financement des écoles à partir d’une taxe obligatoire; une décision de la Cour suprême, à la fin des années trente, (« un propriétaire de commerce peut se conduire comme il veut ») légitimant la discrimination raciale dans les bars de Montréal; la fermeture, après trois ans, en 1976, du seul cégep autochtone (trop revendicateur ?) du Québec.
En quête de trésors, André Martineau exhume que le troisième sous-sol de l’édifice Sun Life, à Montréal, a dissimulé « une grande partie de la richesse de la Grande-Bretagne » de 1940 à 1945 et que, jusqu’en 1977, au-dessous du rez-de-chaussée du « bunker » (ou encore l’édifice J, l’édifice Jean-Talon, le « calorifère ») de la Grande-Allée de Québec, s’entassaient les 30 000 fiches d’individus « potentiellement subversifs » du Centre d’analyse et de documentation, le système de surveillance non officiel du premier ministre Robert Bourassa.
Notre passé explosif n’est pas ignoré du baladin : si on a peut-être trop rapidement identifié le coupable d’un attentat à la bombe faisant trois victimes en 1984, les auteurs et les motifs de cette explosion qui pulvérise le rez-de-chaussée de la résidence du principal magistrat de Montréal en 1969 demeurent encore profondément obscurs. Heureusement, il n’y a pas eu de mort, que des dégâts.
André Martineau nous entraîne même en des terres lointaines, vers cette île de Pâques, où une équipe de professeurs de l’université McGill et de l’université de Montréal voguent en quête d’un lieu « où la civilisation n’est pas encore arrivée » en 1964. Ils vont y faire de surprenantes trouvailles.
Il nous retrace, enfin, comment des enfants de partout au pays prirent « pancartes et porte-voix » pour se soulever contre la hausse du prix (passant de cinq à huit sous) d’une « denrée précieuse à leurs yeux » : la tablette de chocolat. Malgré l’efficacité du boycottage (les ventes diminuèrent de 80%), ils ne purent malheureusement pas contrer la hausse. L’histoire n’aurait pas dû s’arrêter là.
– Christian Vachon (Pantoute), 24 novembre 2024
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