Belles demeures historiques de Québec et de sa région : le cadeau idéal pour les amoureux d’une ville unique

Christian Vachon - 30 décembre 2022

 L’urbaniste et historien François Rémillard, ardent défenseur du patrimoine, part à la recherche, accompagné du photographe émérite Brian Merrett, des trésors cachés d’une ville exceptionnelle dans Belles demeures historiques de Québec et de sa région. Ce merveilleux ouvrage publié aux éditions de l’Homme, nous plonge dans l’intimité (nous sommes des visiteurs privilégiés :  bien de ces résidences sont des propriétés privées et non ouvertes au public) de vingt-cinq maisons patrimoniales de la capitale québécoise, nous suscitant, à chaque page, l’émerveillement.

          Québec est une « ville à part », nous confirme dans la première partie de cet album, François Rémillard.  « Québec est à Montréal ce que Boston est à New York », c’est « la sobriété, le raffinement, l’élégance », et non « l’ostentation et l’individualisme des quartiers montréalais » qui dominent dans son architecture.

          Québec est aussi une ville à part par sa géographie spectaculaire (avec ce plateau, couronné du cap Diamant, se dressant près d’un fleuve « qui se rétrécit », son histoire guerrière, son urbanisme militaire (souligné par ces fortifications, sauvées de la démolition, au milieu du XIXe siècle, par un lord et une lady Dufferin « à l’esprit romantique »), sa topographie sociale particulière (avec ses classes populaires en basse-ville et ses classes mieux nanties en haute-ville), s’embrouillant avec le temps.

          Elle n’est toutefois pas irréprochable cette ville emblématique. François Rémillard nous entretient de trésors disparus, de pertes inestimables pour le patrimoine architectural : un château Saint-Louis (dont il ne subsiste que des fragments), un palais de l’Intendant (ruiné par l’invasion américaine de 1775, et démoli, par la suite, pour faire place à la brasserie Boswell), la Maison Hazeur, Beaumanoir (la résidence secondaire de l’intendant, laissée à l’abandon, dans les années 1850, puis démolie),  les luxueuses et magnifiques résidences bourgeoises de la Grande-Allée supprimées, au début des années 70, pour faire place aux complexes gouvernementaux, et cette Maison Bourdon, à Sillery, face au chemin Saint-Louis, fruit de l’architecte Robert Blatter, inestimable exemple de design moderniste (combinant le style paquebot, le style international et le « constructivisme à la soviétique »), disparue dans l’indifférence générale, au milieu des années 80. Ajoutons aussi, à cette liste, cette immense résidence des Jésuites, face à la basilique-cathédrale, rasée, au milieu du XIXe siècle, pour bâtir, sur son emplacement, l’hôtel de ville actuel.

       Les fouineurs de belles résidences Rémillard et Merrett nous présentent, enfin, dans leur seconde partie, par ordre chronologique (de la maison des Jésuites, au crépi blanchi, érigée, en 1637, sur le chemin des Foulons, à la « moderne » Maison Fiset du quartier Sillery-Sainte-Foy, bâtie en 1961), leurs demeures exceptionnelles, nous faisant voyager de Boischatel (et sa Maison Vézina, au sommet, depuis 1666, de cette falaise jouxtant la chute Montmorency), à la Rive-Sud, à Lévis (où ils nous font partager « l’environnement feutré » de la Maison Desjardins, de 1882, un « bel exemple d’éclectisme en matière d’architecture »).

       Chacune de ces résidences a une histoire, une richesse la distinguant de bien des façons :  le Manoir Montmorency (1780), où se préserve « l’esprit palladien » ; la Maison Estèbe, datant de 1752 (et intégrée, depuis 1987, au musée de la Civilisation), où fut redécouvert, lors de sa restauration, au XXe siècle, un précieux ensemble de lambris de style Louis XV, à motif rocaille, et du papier peint d’origine ; le Manoir Mauvide-Genest, imposante demeure seigneuriale, à Saint-Jean-de-l’Île-d’Orléans, qui nous offre, c’est garanti, un splendide voyage dans le temps grâce à son décor reconstitué d’époque ; Cataraqui, sur le chemin Saint-Louis, rare domaine champêtre du XIXe siècle qui a su éviter l’amputation de son jardin au XXe siècle.

    J’avoue adorer cette Maison Henri-Stuart, « archétype du cottage Regency » du milieu du XIXe siècle, que soulignent son plan carré et sa galerie couverte. Brian Merrett, avec ses images, nous la rend invitante, avec son intérieur « demeuré figé dans le temps ». Les auteurs apprécient tout particulièrement (avec des photos rendant justice au « fabuleux décor intérieur » :  boiseries, ornements métalliques, vitraux…) les Groisardières, sur le chemin Royal, à l’île d’Orléans, une impressionnante maison d’été que la famille Porteous, des mécènes d’artistes canadiens, s’est fait construire, à la fin du XIXe siècle, à cet « emplacement idyllique », à la pointe ouest de l’île.

   On s’en aperçoit, et François Rémillard lui-même n’hésite pas à le souligner, c’est un livre non seulement sur les belles résidences, mais aussi sur les gens qui les ont habitées, qui les habitent actuellement… ou qui les fréquentent. On fait la connaissance d’un Charles Aubert de la Chesnaye, l’homme le plus riche de la Nouvelle-France ; d’un Horatio Walker, le fameux peintre ontarien, contemplant, au début du XXe siècle, de la longue galerie-véranda de sa maison, à Sainte-Pétronille, le havre de Québec ; d’un René Lévesque, intimidé par le « trop chic » décor néo-classique de son « havre de paix », sur la rue d’Auteuil, que lui loue son propriétaire Jacques Joli-Cœur, lors de ses deux mandats de premier ministre. On fait finalement l’éloge des acquéreurs actuels de la Maison Fiset, prenant bien soin de conserver les aspects d’origine, même l’ameublement (de la cuisine au salon) de cette résidence, lumineux exemple de ce concept architectural du début des années soixante, venant de Californie, avec son ouverture quasi complète sur l’extérieur, à l’arrière.

    « Évitons d’être victime des modes », conclut ainsi François Rémillard, « afin de ne pas être condamné à un éternel recommencement », et d’être entouré d’ensembles incohérents.

 

Histoire

Belles demeures historiques de Québec et de sa région

François Rémillard et Brian Merrett - Éditions de l'homme

Ce livre raconte l'histoire des habitants de Québec à travers l'architecture de certaines de ses plus belles demeures. En plus de brosser le portrait de personnages emblématiques, l'ouvrage décrit en détail l'évolution complexe de l'architecture domestique de la cité et de la campagne qui l'entoure, du XVIIe siècle au XXe siècle. Ainsi, la longue histoire de la Vieille Capitale a permis de la doter d'un patrimoine résidentiel exceptionnel, à cheval entre l'Amérique et l'Europe. Grâce à ses nombreuses photographies couleurs inédites, Belles demeures historiques de Québec et de sa région nous permet de découvrir des résidences privées habituellement inaccessibles au public.

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