Le vendeur du magasin de vélos

Eden Giraud - 16 mai 2024

Le vendeur du magasin de vélos est un manga entre le shojo et le josei : une série qui a su conserver le côté flirt et les personnages maladroits du shojo, mais avec des protagonistes dans la trentaine qui évoluent plus rapidement vers une proximité mature et sérieuse. L’autrice joue sur les préjugés et les apparences : Ryôhei a une allure de voyou au grand cœur, aux manières brusques et spontanées. Tomo, quant à elle, est une jeune femme timide. Elle travaille dans un bureau et elle est harcelée par ses collègues masculins. Elle a du mal à se défendre et surtout à dire non. Par le fruit du hasard, la rencontre entre ces deux protagonistes très différents va être le début d’une belle relation amoureuse.

Leur rapprochement joue sur les préjugés et l’image qu’on renvoie ou que les autres se créent de nous. Je me suis aussi laissé avoir et parfois le langage utilisé trop familier me perturbais. Cela pousse à une réflexion sur le langage : son utilisation a un impact sur la perception des individus par la société. En effet, la manière de parler donne une image des gens qui ne correspond peut-être pas ce qu’ils sont réellement. Cette pensée s’image parfaitement à travers Ryôhei : il a le langage et le physique d’un voyou, mais il gagne sa vie honnêtement avec son commerce de vélos. Sa manière de parler brusque et familière cache en fait un personnage au passé lourd, qui a du mal à se faire accepter tel qu’il est.

Le personnage féminin a un profil plus standard d’apparence, mais elle est l’allégorie d’une société patriarcale qui exerce une pression sur les femmes. C’est le portrait d’une société japonaise machiste et inégalitaire. À contrario, Ryôhei, qui est mal vu par la société, est l’exact opposé des harceleurs. C’est le personnage qui respecte le plus Tomo. Derrière ses attitudes rustres et précipitées se cache un personnage à l’écoute, généreux et respectueux.

La psychologie des personnages est vraiment bien travaillée. Par exemple, Ryôhei dit lui-même qu’un jour, il s’est réveillé et qu’il était devenu physiquement un voyou sans savoir ce qui était réellement advenu. Le passé des personnages semble complexe et nous apprenons au fil des pages ce qui a construit leur personnalité. Nos personnages ont d’ailleurs des relations parentales complexes, en tension, et plusieurs zones d’ombre subsistent encore.

La page couverture représente les deux personnages principaux qui mangent une collation dehors. L'homme est à gauche, appuyé sur un lampadaire vert. Il a un toupet blond et le reste des cheveux bruns. Il porte un t-shirt noir et des jeans bleu pâle. Il tient une collation dans sa main droite et regarde la protagoniste, Tomo. Cette dernière est à droite de la couverture et prend une bouchée de ce qui ressemble à un sandwich. Elle a des cheveux rose, coupés aux épaules, un chandail à manches courtes blancs, un débardeur rose pâle, un petit foulard rouge et une jupe bleue. Derrière les personnages, il y a une clôture brun-orange sur laquelle ils sont appuyés, une rivière, des maisons et des arbres. En premier plan, écrit de façon presque manuscrite, le titre du livre apparaît en noir : « Le vendeur du magasin de vélos ».
Page couverture du tome 2

J’ai vraiment apprécié les progrès de leur couple. On en apprend sur leur passé familial et nous les suivons dans les bons moments comme dans ceux plus difficiles. Nos personnages apprennent à se connaître, font des erreurs et dialoguent. Enfin, des rapports positifs et respectueux émergent de chaque côté, malgré les maladresses de chacun, et quel plaisir ! Le personnage féminin évolue tout particulièrement en peu de tomes, ce qui est vraiment agréable à suivre. Elle se transforme assez rapidement, mais de manière naturelle : elle apprend à s’affirmer et à être maîtresse de ses choix et de sa vie. À la fin des trois premiers tomes, leur relation se met en place, mais on perçoit l’approche d’un tournant. Le tome quatre nous apporte de nouveaux enjeux comme les thématiques familiales, professionnelles et la découverte de leurs histoires passées. Ce jeune couple n’a pas fini de nous surprendre, ce n’est que le début de l’intrigue !

Je suis ravie d’avoir pu découvrir ce manga chez Le lézard noir ! Il pourra plaire autant aux jeunes de 16 ans qu’aux jeunes adultes de la vingtaine ou la trentaine, dont je fais partie. Je tiens aussi à souligner le travail effectué à propos des dessins : ils sont particulièrement fins et beaux. Ils font parfaitement ressortir et ressentir les émotions de nos personnages et de leur situation. Je savoure également les pages couleurs, aux teintes chaudes et pastel, en début de chaque tome.

Chaque tome est un nouveau palier dans leur relation, accompagné bien évidemment de maladresses et de quiproquos, tout en ayant un propos plus adulte avec de nouvelles problématiques. Le gros point positif de cette série est la psychologie et le travail effectué sur les personnages, ainsi que la parfaite composition des moments doux dignes d’un shojo, mais pour un public plus mature.

Au-delà de l’histoire d’amour, ce manga est surtout le portrait d’un Japon désillusionné et de la société en général, avec ses nombreuses problématiques. Il pose également un regard sur la famille et comment les liens parents / enfants construisent la personnalité et l’avenir des jeunes. C’est un témoignage touchant sur la disparité sociale et économique, sur l’intégration en société et en milieu professionnel des jeunes.

J’ai pris un grand plaisir à découvrir ce duo à travers leur relation qui repose sur le respect et l’écoute de l’autre. Cette série est loin des clichés d’histoire de bureau qu’on peut voir en ce moment.

Le vendeur du magasin de vélos a 4 tomes, pour le moment, et elle peut se lire à partir de 14 ans.

BD étrangère

Le vendeur du magasin de vélos

Arare Matsumushi - Lézard noir

A 30 ans, Tomoko Hanno, surnommée Panko, est très timide et n'ose pas refuser les avances de son chef ni les invitations de ses collègues. Elle rencontre un jour Takahashi, un réparateur de vélos, qui s'approche souvent trop près d'elle, ce qui ne la dérange pas.

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