Une éclatante histoire des drôles d’uniformes des Expos, des Astros, et autres équipes mémorables du baseball majeur

Christian Vachon - 6 janvier 2021

« It may be ugly, but it’s our ugly” – Tony Gwynn (Mr Padres) évoquant les tons de brun de son jersey

Une histoire d’audaces et de gaffes (des Orioles de Baltimore tout en orange, en 1971, est-ce une bonne idée ?), une histoire où nos Expos sont à l’honneur nous est contée, en neuf chapitres – neuf manches (« innings ») comme il se doit- dans ce Winning Ugly : A Visual History of Baseball’s most unique uniforms, de Todd Radom, publié chez Sports Publishing.

L’auteur en connaît un brin sur le look vestimentaire et les logos :  designer de profession, il a lui-même créé l’identité graphique et les uniformes des Nationals de Washington et des Angels de Los Angeles, sachant, par expérience, que nos regards se teintent souvent de nostalgie pour ce qui fut, un temps, considéré comme grotesque.  Son récit se veut également un hommage à tous ces gens qui osèrent innover dans une ligue trop ancrée dans ses traditions.

Et tradition est parfois synonyme de platitude.  « A dull sea of white and gray » inonde le look des clubs de baseball jusqu’au début des années soixante.  Et les organisations qui empruntent le chemin de la créativité, comme ces Redlegs de Cincinnati, en 1956, qui reproduisirent le visage, hideux comme un slogan nazi, de leur mascotte sur leur uniforme d’équipe visiteuse, sont rapidement, et unanimement, ridiculisées.

Un propriétaire visionnaire, Charles Oscar « Charlie O’ » Finley, conscient que des millions de foyers américains vont se procurer, bientôt, des télé-couleurs, et que le baseball doit attirer l’attention en ajoutant de la fantaisie, propulse ce sport,  en 1963, dans un nouvel ère en faisant porter du vert vif et or à ses joueurs des Athletics d’Oakland.  L’audace est, cette fois-ci, acclamée… et imitée.

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Le vert et or des Athletics d’Oakland, en 1963. — Source

Les années soixante-dix et quatre-vingt peuvent s’enorgueillir d’être « the Golden Era of Ugly Uniforms (intitulé du chapitre – «inning 4 »- du volume de Todd Radom.  Les Phillies de Philadelphie, puis dix autres clubs, vont adopter des couleurs bleu poudre sur la route.  Les joueurs des Pirates de Pittsburgh se déguisent en contrôleurs de train, portant, jusqu’en 1984, une perturbante « flat-topped Anson style » casquette.  Les Padres de San Diego imitent des « tacos » avec leur uniforme aux différentes nuances de brun.  L’apothéose est atteinte avec le look « tequila sunrise » des Astros de Houston aux jerseys striés de bandes « yellow, orange and burnt orange ».   On va loin, en terme de bizarrerie, trop loin même qu’en le propriétaire Bill Veeck envoie sur le terrain, pendant quatre matchs mémorables, au mois d’août 1976, ses White Sox de Chicago en short !

C’est trop de nouveautés pour le baseball.  Suivant le modèle du président Ronald Reagan, il se réconcilie, à la fin des années quatre-vingt, avec le conservatisme.  Les Astros, entre autres, abandonnent, en 1986,  leur signature « arc-en-ciel ».   Même les A’s d’Oakland, qui avaient cette mode de l’effervescence, font marche arrière, adoptant des couleurs moins exubérantes.

On continue, néanmoins, à expérimenter.  Le baseball majeur n’est, d’ailleurs, pas épargné par la vague, infectant le monde du sport professionnel, des années quatre-vingt-dix des jerseys alternatifs aux couleurs « silver, black and purple ». Pire, les années 2000 sont celles d’une « célébration du laid » (« Inning 6 : Laboratory of Ugly Uniforms »).  Des designers fous transforment l’équipe des Diamondbacks de l’Arizona en survivants d’un apocalypse zombie, ou repoussent les limites de la technologie digitale dans les dégradés du logo des Devils Rays de Tampa Bay.

Innover c’est parfois une mauvaise idée renchérit Todd Radom dans son chapitre 7 (« Inning 7 :  When Good Teams Go Bad »).  Pourquoi, en 1956, a-t-on fait disparaître le si classique, et apprécié, « birds on bat » sur l’uniforme des Cardinals de Saint-Louis ?   La réaction des partisans fut si horrifiée que les oiseaux revinrent dès l’année suivante.

Même des logos, des couleurs, qui ont longtemps semblé discutables deviennent indissociables de l’histoire du club.  Les fervents des Blue Jays de Toronto ont célébré, il y a quelques années, avec enthousiasme, le retour au look original du club.  La ferveur populaire a obligé l’organisation des Brewers de Milwaukee a restaurer son symbole de la « ball-in-glove », jugé, et remplacé, en 1999, comme étant « dated and ugly ».   Même les Padres, qui, depuis quelques décennies, avaient mis au rencart le marron, ne purent résister, dans les années 2010, à un mouvement « bring back the brown », stimulé par cet appel de Tony Gwynn :  « Brown is part of who the Padres are ».

Et nos Expos s’invitent à ce grand mouvement de nostalgie.

Radom consacre un chapitre entier (« Inning 5 : The Expos, racing stripes, and the look of the ‘80s”) à l’uniforme des Expos, partant de l’hypothèse qu’il existe « two kinds of people in this world. There are those who think that the Montreal Expos’ logo and uniforms were strange and ugly, and then there are the rest of us”.

L’auteur a même assisté au dernier match de l’équipe montréalaise, à New York, au mois d’avril 2004, où il a tenté d’expliquer, du mieux qu’il pu, à ses filles le logo de l’équipe, « the Grassy Knoll of all baseball logos », créé par la firme Stewart & Morrisson.

C’est quoi, au juste, ce « elb » ?  « A mod-like « m » encompassing an « e”, italicized for forward movement?”.  “Isn’t that a “b” at the far right side?  And, if that’s case, does that stand for “Montreal baseball”, or, perhaps “merci beaucoup”?”.

 À bien des égards, avec leur casquette tricolore, « the funny caps » (« commenting, on the chapeaus (sic), Montreal manager Gene Mauch said « all it needs is a little propeller on top”), les bandes de couleurs sur le pantaloon, “the racing stripes” (“a truly modern and dynamic appearance”),  les Expos ébranlent, dans les années 70 et 80, avec leurs audaces, le monde si rassurant et familier du baseball, « a look that, in restrospect, was to 1980s baseball what Sheana Easton was to 1980s pop music’s: a ubiquitous and somewhat exotic presence that now seems dated and kind of silly”.

Radom le proclame:  “Many teams wore the powder blues, but the Expos’ racing striped powder blues, worns from 1980-91, reign supreme –perfectly balanced, vibrant, uniquely recognizable”.  Il n’y a pas que des Québécois à espérer un retour de « Nos Amours ».

Biographie & Faits Vécus

Winning Ugly: A visual history of baseball's most unique uniforms

Todd Radom - Sports Publishing

Baseball, our national pastime. All fans have great memories of their teams. We also remember those things that we wish we could forget: the errors, the mental mistakes... and the ugly uniforms.

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