Une science folle de musique

Christian Vachon - 19 février 2024

La science est folle de musique et Michel Rochon le sait. Depuis des années, le vulgarisateur scientifique de Radio-Canada collectionne et dévore des centaines d’articles de revues scientifiques où des chercheurs tentent d’expliquer cet étrange pouvoir de la musique sur nous, de mesurer son impact sur notre développement et nos comportements sociaux, de comprendre pourquoi on ne peut pas se passer d’elle. Et les questions ne cessent de se multiplier : faut-il frôler la folie pour être créatif? Comment devient-on un prodige de la musique? Y a-t-il un antidote aux vers d’oreille?

En 2018, dans Le cerveau et la musique : une odyssée fantastique d’art et de science, édité chez Multimondesle journaliste scientifique nous divulguait ces avancées de la neuroscience permettant de comprendre comment le cerveau décode la musique. Maintenant, plus convaincu que jamais que la musique est indispensable à l’humanité, le mélomane curieux récidive en publiant à nouveau chez Multimondes, cette fois avec le livre La musique qui défie la science où il fait la démonstration que la musique soigne, que la musique est le plus puissant des langages universels, que la musique nous accompagne la vie durant.

Mieux, ce lien débute bien avant la naissance, argumente-t-il dans son premier chapitre. Les battements de cœur, dans le ventre de notre mère, est le premier métronome de notre vie, tandis que les mots qu’elle nous murmure deviennent notre première mélodie.

Nous venons à peine d’accoucher que nous usons d’un premier instrument de musique pour exprimer « avec puissance et conviction » nos émotions : la voix. C’est cette même voix qui, en s’améliorant, va mener au bienfait euphorique du chant; des chercheurs au M.I.T. ont localisé, dans une région spécifique du cerveau, « tout près des régions du langage et de la musique », les neurones du chant.

Parfois, dès l’âge de sept ou huit ans, des enfants deviennent extrêmement habiles en jouant d’un instrument de musique, d’étonnants virtuoses. Michel Rochon, dans un ses chapitres suivants, commente que depuis longtemps, la science s’interroge sur ce phénomène des enfants prodiges sans avoir de réponses claires. Quel est le facteur le plus déterminant : l’hérédité, la personnalité, le talent ou la pratique ? « Chaque enfant prodige a son propre profil, » faut-il peut-être conclure et les cas d’enfances malheureuses, comme celle du Québécois André Mathieu, sont trop souvent nombreuses.

La peinture représente deux chérubins, un qui vole et l'autre qui est posé au sol, à gauche d'une femme évachée sur un sol qui semble être fait de nuages. La femme a des cheveux blonds, frisés, remontés en une coiffure de style couronne et porte une toge blanche avec des drapés de bleu et de rouge. Un de ses seins est exposé. Le chérubin au sol essaie de jouer d'une petite lyre posée sur les jambes de la femmes alors que celui qui vole tient une couronne de houx dans une main et tend une flûte à la femme de l'autre main. Trois colombes sont présente : une se trouve au-dessus de l'épaule de la femme, entre le chérubin volant et elle, puis deux autres sont par terre à sa taille devant un livre contenant des partitions de musique. Un autre instrument à vent traîne près des jambes de la femme.
Allégorie de la musique, François Boucher, 1752.

Et qu’en est-il de ce lien entre la folie et la créativité ? « Aucun génie n’existe sans un brin de folie, » professe-t-on depuis l’Antiquité. Un mythe semblent conclure les chercheurs, bien que nombre de musiciens, comme Berlioz, Mahler et Schumann, entre autres, furent atteints d’une quelconque psychopathologie.

Drogue et musique sont également de très vieux copains. Ce copinage remonte même à des milliers d’années, au temps du chamanisme, des premiers rituels d’homo sapiens : « au rythme de la musique, la conscience passe à l’état de transe ». Les portes de la perception s’ouvrent. Et nous pouvons remplir des livres avec les histoires d’alcool, de cocaïne et d’autres mélanges concoctés par les jazzmen et les musiciens rock pour faire face aux contraintes sociales, aux barrières psychologiques affectant les performances.

L’écoute musicale est aussi une drogue en soi. Michel Rochon, lui-même, a vécu une « expérience musicale intense » dans un laboratoire universitaire, un « moment transcendantal de pure joie et d’exaltation ». Toutes les religions ont usé adéquatement de cet effet spirituel de la musique : l’œuvre géniale de Bach, concluent des chercheurs, enflamme nos réseaux cérébraux, contribue à un sentiment d’eudémonisme, de bonheur suprême, et inspire un état d’âme propice à la spiritualité.

Des résultats sont probants montrent que l’écoute de la musique a aussi des effets bénéfiques sur les cerveaux schizophrènes, en réduisant l’anxiété et tout ce qui accompagne la dépression. Et, en temps de crise, il n’y a pas de meilleur réconfort que la musique. En tant que langage universel, par son pouvoir unificateur, elle permet d’affronter les périls. Les exemples sont significatifs et le journaliste consacre son dernier chapitre à ce phénomène : « à chaque épidémie, la musique a eu un rôle de catharsis »; « utiliser la musique sert à transmettre le courage, l’espoir et l’inspiration en temps de guerre ».

La musique, quel que soit le contexte de sa manifestation, nous habite « de la naissance à la mort ». Et toutes les musiques sont bonnes : « il n’existe pas de musique supérieure, la musique qui importe est celle qui vous fait vibrer personnellement ».

La musique, faut-il conclure, ne se cantonne pas à l’humain. L’universalité de la musique s’étend même à la nature : « les structures harmoniques et mélodiques de la musique existent dans d’autres formes du vivant et même du non vivant ».

La musique, donc, adore défier la science et les chercheurs tentent d’y faire face, tout comme les musiciens poursuivent leurs explorations, tentant de créer des sons nouveaux « sachant refléter nos aspirations et nous motivant à imaginer des solutions et à résoudre les impasses ».

– Christian Vachon (Pantoute), 18 février 2024

Sciences

La musique qui défie la science

Michel Rochon - Multimondes

On ne peut pas vivre sans musique. Dès les premiers instants de la vie intra-utérine jusqu’aux grands moments qui traversent la vie de tout un chacun, la musique a des effets, encore mal compris, sur notre développement. Notre relation avec la musique n’est pas sans mystère. Et les questions fusent de toutes parts à ce propos. Comment la musique peut-elle être bénéfique pour le corps et l’âme ? Peut-elle être utile à la médecine ?

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